La première vidéo, filmée dans des vestiaires, met en scène une discussion entre deux jeunes hommes, contre toute attente très respectueuse.
L’un d’eux raconte à l’autre son dernier rendez-vous romantique… en omettant les commentaires habituellement dégradants ou violents associés à ce genre de conversation dans ce genre d’environnement.
«L’objectif, c’était vraiment de casser le mythe des discussions de vestiaires», commente Maïra Martin, directrice générale de l’AOcVF.
«Il y a eu plusieurs cas, plusieurs histoires qui sont sortis au cours de ces dernières années sur tout ce qui se passe dans les vestiaires et toute cette culture de masculinité toxique au sein des équipes sportives dans les vestiaires. On a souhaité détourner cela et se dire que normalement, une discussion de vestiaire devrait porter sur le consentement, par exemple.»
Relation sécuritaire
La deuxième capsule fait un parallèle entre la sécurité d’un véhicule et la sécurité dans une relation conjugale. Le scénario prétend que les éléments sécuritaires d’une voiture sont optionnels (absurde!) pour démontrer que les situations d’insécurité dans lesquelles peuvent se trouver certaines femmes dans leur relation conjugale sont tout aussi insensées.
«Si on n’accepte pas qu’une voiture ne soit pas sécuritaire, pourquoi encore aujourd’hui en 2021 la société accepte-t-elle encore, ou du moins n’agit-elle pas suffisamment pour lutter contre la violence faite aux femmes?», explique Maïra Martin.
Des mythes sur la violence conjugale… et toutes les agressions
Lancée en 2012, la campagne Traçons-les-limites se renouvèle chaque année au mois de mai. Leurs récentes capsules ont pour but de défaire les mythes et d’ouvrir le dialogue sur les agressions à caractère sexuel.
«Pour beaucoup de gens encore, une agression sexuelle c’est un viol, très souvent commis par un inconnu, un peu tard dans la rue. Nous souhaitons défaire ces mythes. Notre objectif est de parler du continuum de la violence à caractère sexuel sous toutes ses formes : le viol ou la tentative de viol, les attouchements, le harcèlement…»
Consultez le site du journal L’Express
Violence conjugale et misogynie, signes précurseurs de tueries de masse
Ce Mois de la prévention de l’agression sexuelle coïncide également avec le premier anniversaire de la tuerie de masse de Portapique en Nouvelle-Écosse — la pire au Canada — qui a fait 22 victimes.
En s’appuyant sur des recherches américaines, l’organisme Action ontarienne contre la violence faite aux femmes a publié son analyse liant la misogynie aux tueries de masse.
Ces études démontrent que la grande majorité des auteurs de tueries de masses ont eu au préalable des propos contre les féministes sur les médias sociaux, ou ont réalisé des recherches Internet liées à la misogynie, ou encore ont eu des liens avec des groupes Incel («célibataires involontaires»).
D’autres ont même été accusées par leur conjointe ou ex-conjointe de violences conjugales. Dans le cas de l’auteur de la tuerie de Portapique, une de ses anciennes conjointes s’était plainte de violences auparavant.
«On a aussi fait le lien avec ce qui s’était passé à Toronto le 23 avril 2018, où un homme avait foncé sur des piétons sur un trottoir. L’auteur avait des liens avec des groupes Incel et plus de la moitié de ses victimes étaient des femmes».
Croire les victimes pour éviter le drame
Avec ces constats, l’AOcVF tente de prévenir ces situations en encourageant d’accorder plus de crédibilité aux témoignages des femmes victimes de violences.
«C’est important de ne pas minimiser, de croire, d’agir, parce que lorsqu’une femme vient dénoncer de la violence de la part de son conjoint ou de son ex-conjoint, cela vient d’un sentiment de peur. C’est certain que si elle le fait, elle a des raisons de craindre pour sa sécurité, donc il est nécessaire de l’écouter pour éviter qu’elle soit tuée ou éviter les tueries de masses.»
«La misogynie tue», rappelle Maïra Martin.
L’AOcVF s’engage aussi sur le front des armes à feu
L’AOcVF milite également contre les armes à feu. II y a quelques années, lorsque l’ancien gouvernement fédéral avait démantelé l’ancien registre national des armes à feu, l’AOcVF s’était associée avec d’autres groupes pour militer contre cette abolition.
«Beaucoup de femmes sont tuées par leur conjoint ou ex-conjoint avec une arme à feu, donc c’est très important de surveiller le profil des personnes qui peuvent avoir accès à ces armes à feu, et considérer qu’elles peuvent les utiliser contre une autre personne et notamment contre une femme.»
Sensibiliser l’entourage des victimes
Le but de la campagne est de sensibiliser tout le monde. Elle s’adresse à un public plutôt jeune, même si certains volets s’adressent à un public plus âgé.
D’autres campagnes mises en place par AOcVF visent des publics plus spécifiques. La campagne Voir la Violence sensibilise à la violence conjugale chez les adultes, alors que la campagne Ouvre les Yeux est plutôt destinée aux jeunes.
Leur action première vise à sensibiliser les personnes de l’entourage des victimes sur la violence conjugale, afin qu’ils interviennent.
AOcVF offre aussi des formations en ligne sur la violence à caractère sexuel, la violence conjugale et d’autres thèmes. Cette quarantaine d’ateliers gratuits s’adresse en priorité aux professionnels : aux travailleurs sociaux dans le secteur de la santé, de la justice, dans le secteur communautaire. Ce sont ces personnes-là qui vont être amenées à un moment donné à soutenir des femmes aux prises avec la violence.
Le web: un outil utile pour sensibiliser à la violence conjugale
Étant un organisme provincial, les actions d’AOcVF passent beaucoup par le web pour couvrir tout l’Ontario. Ces messages sont aussi beaucoup relayés par les maisons d’hébergement en partenariat, les Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS).
Les services externes en violence conjugale utilisent certains de leurs outils ou en développent de nouveaux pour sensibiliser au plus près des communautés.
La covid a freiné l’organisation
Maïra Martin rappelle que la pandémie a été très contraignante pour les activités d’AOcVF, ralentissant par exemple l’implantation des campagnes dans les écoles, les collèges, et universités.
Le travail de soutien aux survivantes a été tout autant impacté par la difficulté d’accueillir les femmes qui viennent chercher de l’aide en tant que victime.