«C’est la première action à prendre, a répété Yvette Finn. J’espère que le gouvernement mettra en place cette recommandation le plus vite possible.»
Ce ministère centraliserait la mise en application de la loi et assumerait la responsabilité et des langues officielles au sein de toutes les composantes du gouvernement.
«Il ne semble pas y avoir d’aide pour le premier ministre afin de s’assurer que les questions de langues officielles reçoivent l’attention qu’elles méritent, constate John McLaughlin. S’il y avait ce ministère, il y aurait quelqu’un pour gérer les problèmes avant qu’ils deviennent explosifs.»
Recommandation de créer un comité permanent
Les commissaires ont également préconisé la constitution d’un comité permanent des langues officielles à l’Assemblée législative. Les élus qui le composeraient suivraient les progrès relatifs à l’application de la loi, liraient les rapports du commissaire aux langues officielles et formuleraient des recommandations.
«Nous avons besoin d’une discussion continue, constructive et respectueuse à propos de ce que c’est que d’être une province officiellement bilingue», estime John McLaughlin, en référence aux tensions provoquées par le sujet.
Il a noté avec sa collègue qu’il existe un besoin pressant de dialogue, d’interaction, de compréhension et de confiance entre les communautés linguistiques officielles du Nouveau-Brunswick. Il pense que les députés peuvent le combler.
«Les avantages économiques potentiels devraient à eux seuls nous inciter à adopter, célébrer et promouvoir notre engagement à l’égard [du] bilinguisme», ont fait valoir les deux commissaires.
Plus de pouvoir pour le commissaire
Ils suggèrent aussi d’accroitre le pouvoir du commissaire aux langues officielles. Ils souhaitent par exemple que les responsables d’institutions avancent des solutions dans un délai de 30 jours, à la suite d’une enquête du fonctionnaire indépendant.
Le premier ministre devrait répondre d’une façon similaire à son rapport annuel en 90 jours, selon eux.
Les deux commissaires conseillent aussi l’assujettissement des foyers de soins à la Loi sur les langues officielles (LLO) en même temps que l’élaboration d’une stratégie pour améliorer leur capacité à fournir des services de qualité égale en français et en anglais.
«Nous voyons ça comme un enjeu de dignité humaine, particulièrement pour les personnes vulnérables et dépendantes, a commenté John McLaughlin. Nous devons toutefois prendre en considération le manque de main-d’œuvre dans le domaine médical et les listes d’attente pour des places en foyers de soins.»
Yvette Finn déplore enfin l’imprécision des exigences linguistiques pour les postes de la fonction publique. Son rapport demande une clarification avec de meilleures formations et évaluations.
Révision rapprochée
«C’est une chose d’être désignée officiellement bilingue en vertu d’une loi. C’en est une autre de l’être véritablement par la voie d’une action, d’une volonté et d’un engagement», remarquent les commissaires.
Ils conseillent d’ailleurs que la prochaine révision de la LLO ait lieu dans cinq ans, au lieu de la décennie prévue par la législation actuelle.
«Nous avons l’espoir d’évaluer les progrès effectués», déclare Yvette Finn.
Des réactions plutôt positives
«L’important, c’est l’action du gouvernement», remarque le président de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), Alexandre Cédric Doucet.
Ce dernier se montre en tout cas favorable aux suggestions des deux commissaires chargés de la révision de la Loi sur les langues officielles, Yvette Finn et John McLaughlin.
«Je vais quand même garder une réserve pour analyser plus en détail les recommandations», nuance-t-il.
M. Doucet remarque l’absence de requête pour des modifications législatives visant à assurer une proportion égale d’immigrants francophones et anglophones, par le biais d’un ministère de l’immigration provincial.
«Je suis fortement déçu, exprime le militant. Nous allons faire un suivi pour nous assurer que le projet de loi comprenne un élément sur la question.»
La SANB en a fait la demande en aout, avec cinq autres doléances. Parmi elles, le droit des fonctionnaires de travailler dans leur langue ainsi que le bilinguisme obligatoire pour tous les porte-paroles du gouvernement et les agents de l’Assemblée législative (comme le vérificateur général).
«Il manque de détails», commente M. Doucet à propos de ces points.
Le Parti libéral du Nouveau-Brunswick attend aussi de voir comment réagira le gouvernement de Blaine Higgs.
«En faisant une première lecture du rapport, je suis heureux de voir des recommandations ambitieuses et substantielles», commente en tout cas le porte-parole de l’opposition officielle en matière de LLO, Benoît Bourque.
Le chef du Parti vert, David Coon, soutient également le rapport de Yvette Finn et John McLaughlin.
«Depuis plus de deux ans, j’essaie de convaincre le premier ministre de la nécessité d’un comité permanent sur les langues officielles», a d’ailleurs rappelé le député écologiste, Kevin Arseneau.
M. Coon exhorte M. Higgs à accepter les recommandations des commissaires et à les mettre en œuvre avec des ressources suffisantes.
«Le bilinguisme officiel est un élément précieux de notre culture et de notre histoire, et il continuera d’en être ainsi à l’avenir», a déclaré le premier ministre Higgs, par communiqué.
Il a toutefois refusé de commenter le rapport de Mme Finn et M. McLaughlin, prétextant ne pas encore l’avoir lu, par manque de temps.