«Il faut toujours se rappeler d’où vient l’UOF»

«Il faut toujours se rappeler d’où vient l’UOF»

Entré en fonction le 7 juillet dernier, Pierre Ouellette s’enthousiasme que l’Université de l’Ontario français (UOF) ait reçu à la mi-juillet près de 450 demandes d’admission, dont 327 ont été retenues.

Quelque 150 de ces candidats ont accepté l’offre de l’établissement, mais le recteur demeure pragmatique: «On pense, si la tendance se maintient, que d’ici la rentrée on devrait avoir approximativement une centaine d’étudiants inscrits dans nos quatre programmes de quatre ans.»

Quant aux 17 microprogrammes offerts par l’UOF, ils ont été l’objet de plus de 200 demandes d’après le recteur. Le nouveau recteur pense y accueillir une trentaine d’étudiants en septembre.

Ces programmes sont réservés aux ressortissantes et ressortissants canadiens en vertu des règles d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC): «Pour obtenir un permis d’études, une étudiante ou un étudiant étranger doit être inscrit à temps plein. Hors, tous les microprogrammes de l’UOF sont offerts à temps partiel», précise-t-on aux communications de l’UOF.

«La situation peut changer très rapidement, notamment avec la COVID, nuance toutefois Pierre Ouellette. Une grande partie des personnes inscrites sont des étudiants internationaux», qui pourraient changer d’avis en fonction de la situation sanitaire.

Regagner le «momentum»

En tout et pour tout, l’UOF estime que la proportion d’étudiants canadiens inscrits à l’UOF est d’environ 30%, la balance étant constituée d’étudiants étrangers.

S’il considère que ce ratio «est déséquilibré pour l’instant», Pierre Ouellette explique que c’est en grande partie en raison de l’approbation des programmes de l’UOF, qui s’est faite plus tard que souhaité l’an dernier : «On n’a pas pu partir en tournée de recrutement, même pas en virtuel, avant très tard à l’automne […] On va souhaiter rééquilibrer la proportion dans les prochaines années.»

Ces chiffres, bien qu’approximatifs, réjouissent tout de même celui qui reprend la barre de l’UOF après que le tout premier recteur de l’établissement, André Roy, ait quitté son poste à peine six mois après son arrivée.

Un mois plus tôt, en janvier 2021, le peu d’inscriptions à l’UOF avait fait parler dans les médias.

S’il n’en sait pas plus sur les raisons qui ont provoqué le départ du précédent recteur, Pierre Ouellette souligne qu’il «arrive avec la volonté de travailler avec les équipes et d’essayer de redonner au projet un momentum que, j’ai senti comme observateur à partir du mois de janvier, qu’on avait un peu perdu […] Généralement, je pense qu’on a vraiment le vent dans les voiles et le momentum de notre côté».

L’innovation, une force… et un défi

Avant de passer cinq ans au poste de direction de Radio-Canada Ontario, Pierre Ouellette a notamment occupé, de 2011 à 2016, le poste de recteur à l’Université de Hearst (UdeH).

«Il y a assurément des points en commun [entre le rectorat à l’UOF et à l’UdeH] […] Résoudre des défis à Hearst ou à l’UOF à Toronto, qui travaille pour le Centre-Sud-Ouest, ce n’est pas exactement la même chose, mais l’enjeu important, c’est celui du recrutement. C’est ma priorité numéro un à l’UOF et ce l’était à Hearst», souligne le recteur.

Pierre Ouellette compte toutefois adapter les tactiques à l’aspect «innovant, original» de l’UOF: «Ce qui m’a vraiment impressionné et franchement charmé du projet, c’est son caractère innovant […] Dans sa signature pédagogique, dans l’idée de vouloir faire beaucoup d’apprentissages par l’expérience, de vouloir travailler en partenariat avec la communauté […] Il faut aussi être innovants dans nos approches de recrutement pour que les gens vivent cette innovation-là en amont.»

Ce qui fait la force de l’Université, d’après le recteur, est toutefois également ce qui constitue ses plus grands défis. Convaincre les étudiants — et parfois même leurs parents — d’adhérer aux propositions «innovantes» de l’UOF n’est pas gagné d’avance.

«Si les parents ont étudié dans une université plus traditionnelle, ils pourraient ne pas comprendre ce qu’on est en train de faire à l’UOF. Nos programmes sont axés sur les grands défis de la société d’aujourd’hui… Ils ont été critiqués par certaines personnes, souvent des profs d’université qui défendent leur propre façon de faire, mais nos programmes sont axés sur les besoins de diplômés qui vont ensuite aller dans le monde et avoir un impact sur la société, dans les domaines qu’on a ciblés», explique Pierre Ouellette.

L’établissement espère d’ailleurs offrir un cinquième baccalauréat, en éducation, à la rentrée 2022 – le programme est en attente d’approbation de la province. «Ça répond à un besoin criant de la société franco-ontarienne, qui est la disponibilité de personnel enseignant qualifié en français […] On veut toujours être aux aguets, à essayer de voir quels sont les besoins de la communauté en matière de formation et de programmes, mais aussi comment les offrir», indique le recteur. 

Avec une offre de cours en comodalité — avec l’option d’être en classe ou à distance —, «beaucoup de ce qu’on a fait a été réfléchi en fonction de l’expérience étudiante».

Plus de partenariats envisagés

L’UOF ouvrira ses portes dans un contexte mouvementé pour l’éducation francophone postsecondaire en Ontario. Pierre Ouellette indique toutefois que l’établissement est très ouvert aux possibilités de partenariat avec ses homologues.

«Il y a déjà des collaborations qui ont été établies avant même que j’arrive; avec l’Université de Hearst par exemple, l’autre université de langue française en Ontario, un partenariat existe et va continuer de se développer. On travaille aussi à des initiatives avec le Collège La Cité, à Ottawa.»

Quant au Moyen-Nord, le recteur indique regarder «de très, très près ce qui se passe à Sudbury. Ce qui s’est passé à l’Université Laurentienne m’a touché de très près, j’ai moi-même étudié dans un département qui n’existe plus aujourd’hui», précise Pierre Ouellette.

«On sait qu’il y a du potentiel pour collaborer, beaucoup de personnes ont parlé d’un réseau d’universités de langue française en Ontario ; c’est une belle possibilité! Mais on va attendre de voir, laisser les gens du Moyen-Nord essayer de faire un tri dans ce qui se passe, se concerter, travailler ensemble», enchaine-t-il.

Le recteur estime que «ce n’est pas à nous, comme Université de l’Ontario français qui n’avons même pas encore offert notre premier cours, d’arriver à la Laurentienne et de dire: “C’est comme ça que ça devrait se faire.” Ça ne sera pas ça notre approche, notre attitude. Mais on est très ouverts à parler avec tout le monde et à travailler de façon collaborative».

Pour celui qui a participé en 2012 aux États généraux sur le postsecondaire en Ontario français, orchestrés par le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), «il faut toujours se rappeler d’où vient l’UOF, c’est quoi la volonté de la communauté, des gouvernements; c’est pour remplir un besoin au niveau de l’accès aux études en français au niveau universitaire dans le Centre et le Sud-Ouest. Notre recrutement doit prioriser d’abord ces populations-là».

Enfin, Pierre Ouellette ajoute qu’il se sent «incroyablement choyé d’assister au lancement d’une nouvelle université – ça n’arrive vraiment pas souvent, surtout au Canada français à l’extérieur du Québec! On a de nouvelles installations, un campus archimoderne à cinq minutes du lac Ontario, de nouveaux programmes, du nouveau personnel… Je me trouve vraiment très chanceux de pouvoir vivre ça, ça m’enthousiasme énormément».

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