Gilles Tessier de Lachute est l’auteur de Manufacture Criminelle. Il s’agit du fruit d’un manuscrit qui a pris plus de deux décennies à compléter. Le livre, qui fait 330 pages et publié le 13 octobre dernier, est un récit poignant empreint de réalisme dans son propos.
Si le manuscrit a pris une vingtaine d’années à être complété, le projet de livre de cet auteur date d’encore plus longtemps. C’est à 13 ans qu’il prend cette décision suite à une révélation toute particulière de la part de son travailleur social : sa mère décédée était en fait Monica La Mitraille (Monica Proietti), qui avait braqué une vingtaine de banques au cours des années 1960 dans la région montréalaise. Elle est décédée en 1967, à l’âge de 27 ans. Son père aussi, Viateur Tessier, était braqueur de banque et était déjà en prison au moment des faits lorsque « machine gun Molly » comme la presse anglophone l’appelait, s’est faite abattre par la police.
Cette journée-là, M. Tessier s’en souvient de manière vive. «On m’a annoncé ça et ça m’a époustouflé. Déjà que j’avais eu une enfance extrêmement difficile jusque-là. J’ai alors pris une décision. J’ai décidé de vivre ma vie à 100 milles à l’heure et que quand je serai vieux, j’écrirai un livre. L’homme a donc connu une vie assez turbulente, motivé par le sentiment qu’il n’avait rien à perdre.
Le récit du livre de l’écrivain lachutois détaille donc cette course effrénée à travers le monde interlope et ensuite carcéral. Le jeune Tessier à commencé le vol de domiciles de son quartier à 12 ans. Il a ensuite diversifié ses activités en perpétrant des vols dans différents types de commerces tels que bijouteries ou magasins de produits de luxe. Ses activités étaient assez diversifiées, si bien qu’il finira bien évidemment par avoir une collision frontale avec la loi dans sa course à 100 milles à l’heure. Gilles Tessier s’est donc fait incarcérer.
Il a terminé ses études secondaires au pénitencier Archambault vers l’âge de 45 ans. C’est dans cette mouvance que Gilles Tessier a découvert la lecture, puisqu’il avait 15 ans de temps libre pour le faire. Il a donc fait la connaissance des ouvrages de Isaac Asimov et Mary Higgins Clark, entre autres.
M. Tessier se souvient de son séjour carcéral avec amertume. «Il n’y a pas de travail en prison. Il n’y a pas de formation (si la cote de sécurité est trop élevée)», raconte l’auteur. De plus, il déplore le fait que les séjours de désintoxication offerts duraient autrefois neuf mois. Ils ont ensuite été réduits à sept mois, puis avec les contraintes budgétaires, ils sont maintenant d’une durée de trois mois. Ceci ne permet pas de sortir la personne en traitement de toute une vie de mauvaises habitudes.
«On a besoin d’au moins six mois, juste pour être en mesure de penser de soi-même, a expliqué M. Tessier. Avant ça, c’est encore le mode de pensée de la drogue qui domine tout.».
Aujourd’hui, cela fait deux ans que Gilles Tessier s’est émancipé du monde carcéral et de l’enfer qui l’entourait. Il considère que la prison dans son état actuel est une manufacture à criminels qui ne se réforme pas à souhait.
«C’est simple: la majorité des crimes découlent de situations reliées à la drogue et à l’alcool. Si ces problèmes étaient éradiqués, les prisons seraient presque vides», soutient M. Tessier. Le livre plonge également dans ces questions et leurs répercussions sociétales.