L’Université Laurentienne, par exemple, prévoit déjà un manque à gagner de 9 millions $ pour l’année 2020-2021. Les raisons derrière ce déficit sont multiples : moins d’inscriptions anticipées, moins d’étudiants dans les résidences, perte de revenus de locations de salles, etc.
Malgré les pertes de revenus, les dépenses fixes restent, dont les dettes et les salaires – quoique les gestionnaires et employés de soutien ont accepté des baisses salariales. Les économies réalisées sur la facture d’électricité et autres dépenses sont minimes malgré le campus vide. «Les dépenses sont sensiblement les mêmes et on a des dépenses supplémentaires à cause du nettoyage et autres», affirme le vice-recteur aux études par intérim, Serge Demers.
Dans ces conditions, il devient difficile de penser redonner de l’argent aux étudiants.
Pourtant, lorsqu’on écoute certaines histoires, il est difficile d’ignorer la situation des étudiants qui n’ont pas accès à tous les services pour lesquels ils paient.
Leyla Gbian est étudiante internationale originaire du Bénin. Elle est à l’Université Laurentienne depuis 7 ans et achève sa maitrise en chimie. Elle n’a plus de cours à suivre et, dans le fond, ses frais de scolarité lui donnent seulement accès aux laboratoires et à la supervision de son directeur de thèse. Rappelons que les étudiants internationaux paient presque le double des frais des étudiants ontariens.
Au moment où l’université a décidé de fermer son campus, il restait à Mme Gbian à peine deux semaines de travaux à faire en laboratoire pour compléter la partie expérimentale de sa recherche. «Techniquement, je suis bloquée. Au moins, avec mon prof, on a décidé de se concentrer sur la rédaction», raconte-t-elle. Par contre, ne pas avoir accès à la bibliothèque a aussi compliqué cette partie de ses travaux.
Mais sans retrouver l’accès au laboratoire, sa recherche est incomplète. Les premières demandes pour y avoir exceptionnellement accès ont été refusées. L’étudiante, qui croyait avoir presque terminé en avril — et peut-être aller rendre visite à ses parents pour la première fois depuis trois ans —, est donc restée coincée à Sudbury et a dû s’inscrire à la session d’été, ce qu’elle n’aurait peut-être pas fait sans la pandémie.
«Je comprends que les frais de scolarité ça inclut beaucoup de choses, peut-être des choses dont je ne suis pas complètement consciente, mais de ma compréhension, la majorité de ces frais [c’est pour les cours que je n’ai plus]. Concrètement, c’est plus pour maintenir mon statut et utiliser le matériel de l’université», considère Mme Gbian.
Est-ce qu’il y a une marge de manœuvre pour accommoder certains étudiants dont les études sont carrément bloquées? D’une certaine façon, il y a place à la négociation, propose Serge Demers. Les universités ont souvent quelques bourses — de quelques centaines de dollars — qu’elles peuvent remettre à des étudiants qui sont en difficulté.
Dans le cas de Leyla Gbian, elle a finalement eu accès au laboratoire la semaine dernière et est en train de poursuivre ses expériences. Si les frais d’inscription pour la session d’été sont restés inchangés, elle reconnait certains efforts faits par l’université pour alléger le fardeau de certains étudiants, comme un montant de 500 $ qui lui a été promis dans une lettre.
La valeur des cours à distance
L’Université Laurentienne a déjà décidé d’offrir une large part de ses cours en ligne à l’automne, minimisant la présence sur campus, et les étudiants considèrent que le cout ou la valeur de cette formation est moindre.
M. Demers rappelle que les cours à distance existaient avant internet et que, à l’époque où on envoyait tout par la poste, l’inscription à ces cours coutait un peu plus cher que sur campus en raison de l’examen final à organiser. L’enseignement a la même valeur et le diplôme reçu par le finissant a aussi la même valeur qu’un diplôme obtenu seulement en présentiel, affirme-t-il.