Besoin de financement pour la Maison Interlude

Par Antoine Messier
Besoin de financement pour la Maison Interlude
De gauche à droite : Marie-Pierre D’Anjou, responsable des communications et du développement communautaire à la Maison Interlude et Muriel Lalonde, directrice générale de la Maison Interlude. (Photo : photo d'archives)

La Maison Interlude House (MIH) n’a pas vu de changement à son financement de la part du ministère des Services à l’enfance et des Services sociaux et communautaires (MSESSC) depuis 2014, entrainant des problèmes qui pourraient avoir de graves répercussions pour l’organisme à but non-lucratif à long terme.

La Maison Interlude reçoit environ 1,8$ millions en financement du MSESSC à chaque année pour couvrir les frais opérationnels incluant les salaires des 25 employés de l’organisme, l’entretien de la maison d’hébergement, la nourriture pour les femmes hébergées, ainsi que tous les autres frais associés aux services externes offerts à plus de 500 femmes chaque année.

Ce 1,8 million de dollar n’a vu aucun changement depuis 2014 malgré l’indice des prix à la consommation (IPC) à la hausse, incluant le prix des aliments, du logement, des dépenses courantes, des vêtements, des transports, des soins de santé, des produits de soins personnels, des loisirs, des formations, des boissons alcoolisées, des produits du tabac et du cannabis récréatif, particulièrement pendant la pandémie. En 2022, l’IPC a atteint son sommet depuis 1982 avec une hausse annuelle de 6,8%.

Augmentations salariales

« Les employés veulent rester à la Maison Interlude. Mais quand il s’agit de mettre du pain sur la table pour ta famille, c’est là où le bât blesse », a affirmé Muriel Lalonde, directrice générale de MIH. La Maison Interlude veut s’assurer, et revendique même, que les femmes aient des conditions de travail et des salaires équitables mais ne peut payer ses employés compétitivement à l’interne, à cause du manque de financement.

« Pour travailler dans un organisme à but non-lucratif, faut que tu aies une passion pour ce que tu fais parce que les salaires ne sont pas comme dans une entreprise privée », a ajouté Mme. Lalonde. Maintenant, la MIH ne compétitionne même plus avec certains autres organismes qui ont pu offrir des augmentations salariales récemment.

D’après Mme. Lalonde, 12 employées de terrain, travaillant directement avec les femmes, ont quitté la Maison Interlude dans la dernière année seulement. Le recrutement est d’ailleurs devenu de plus en plus difficile. MIH a un poste affiché à Cornwall depuis novembre, qui n’a pas été comblé à cause d’un manque de candidats qualifiés. Les intervenantes de la MIH sont d’ailleurs des employées à risque, qui doivent parfois croiser les agresseurs de leurs clientes.

Subventions temporaires

La Maison Interlude offre des services d’hébergement d’urgence pour les femmes victimes de violence qui doivent sortir de leur demeure, sans endroit où aller, ainsi que des services externes d’intervention mobilisée dans la communauté pour les femmes qui n’ont pas besoin des services d’hébergement.

Bien que la MIH n’a pas vu de hausse dans son financement du gouvernement provincial, les demandes de services sont à la hausse dans les dernières années. D’après Mme. Lalonde, la MIH devra peut-être mettre des femmes sur des listes d’attente pour les services externes de la MIH, puisque l’organisme s’approche gravement de la sursaturation.

Avant la pandémie de Covid-19, Marie-Pierre D’Anjou, responsable des communications et du développement communautaire de la MIH, estime que l’organisme offrait des services externes à environ 500 femmes par année. Ce chiffre a augmenté de plus de 20%. Entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023, le nombre de femmes ayant reçu des services de la MIH était de 630.

Pourtant, la MIH ne peut pas engager de nouvelles employées pour combler les besoins frappant de l’organisme, parce que le MSESSC n’augmente pas son financement, et les autres opportunités de financement offertes sont temporaires. « C’est très rare qu’on peut attitrer des salaires aux subventions. Si oui, c’est pour une période limitée dans le temps, a expliqué Marie-Pierre D’Anjou. Après ça, ces fonds-là disparaissent. »

Des programmes de courte durée

Avec les subventions qui ne durent que quelques années, les programmes lancés par la Maison Interludes ont dû être rapidement fermés. C’est l’exemple du programme Femme sans toit, qui offrait de l’hébergement et de l’encadrement à des femmes avec des problèmes de toxicomanie ou des femmes atteintes de problèmes de santé mentale. Ces femmes ne pouvaient pas être hébergées avec les autres femmes du service d’hébergement de la MIH. Un endroit séparé au sous-sol de la maison d’hébergement leur était réservé.

Les femmes qui étaient hébergées étaient des femmes qui n’avaient pas d’opportunités d’hébergement dans aucun autre organisme de la région de Prescott-Russell. Malheureusement, le programme n’a duré qu’un an, à cause de la courte durée des subventions, et depuis la fin du programme en avril dernier, les femmes ne pouvaient plus recevoir de service d’hébergement.

Néanmoins, la Maison Interlude a mis en place un service de clavardage pour répondre aux questions et une ligne de crise pour les femmes. Entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023, la MIH a répondu à 1 098 appels de crise dans Prescott-Russell. Ce service jugé nécessaire par Mme. Lalonde sera conservé malgré le manque de financement, mais pour certaines employées, cela signifie plus de travail pour le même salaire.

Mme. Lalonde pense qu’un 500 000 $ additionnel par année pour l’organisme répondrait à tous ses problèmes, mais pour l’instant, le volet sensibilisation et éducation de la MIH en écope. Les intervenantes ont déjà un horaire saturé et ne peuvent aller faire des présentations pour éduquer la population sur la violence faite aux femmes et les services qui leur sont offerts. Mais si la tendance continue, tous les services de la MIH en écoperont. « Si nos financements n’augmentent pas, on ne sera plus capable d’offrir de services aux femmes qui vivent de la violence en ce moment, a affirmé Mme. Lalonde, et de l’autre côté, on n’aura plus personne pour travailler. »

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