Elle aura vu passer des centaines d’élèves dans sa classe. Plusieurs d’entre eux sont devenus parents et certains de leurs enfants l’ont aussi eu comme enseignante. Mais le 27 juin prochain, après plus de 34 ans à enseigner surtout le français, Hélène Proulx prendra sa retraite. Le plus exceptionnel dans cette histoire sera le fait qu’elle aura passé toute sa carrière au sein du Parallèle, le centre de formation générale pour adultes de Lachute.
La formation générale pour adultes permet notamment aux adultes, peu importe leur âge, de suivre des cours en vue d’obtenir leur diplôme d’études secondaires ou des pré-requis pour des études post-secondaires. La clientèle est donc passablement différente de celle rencontrée dans les écoles secondaires dites régulières.
Si les élèves qui décident de s’inscrire à l’éducation aux adultes le font par choix, c’est plutôt par pur hasard qu’Hélène Proulx s’est retrouvée à enseigner dans ce domaine. Détentrice d’un baccalauréat en littérature française, elle a obtenu par la suite un certificat en archivistique pour devenir archiviste spécialisée en documents historiques.
« Je travaillais dans des musées mais ce n’était pas une période facile, a-t-elle raconté. C’était souvent des contrats de six mois qui n’étaient pas toujours renouvelés. »
C’est au terme d’un de ces contrats que madame Proulx, originaire de Saint-André, a décidé de tenter sa chance auprès de la Commission scolaire du Long-Sault, qui s’occupait à l’époque des écoles francophones de la MRC, en envoyant son CV en guise de candidature spontanée pour un poste d’archiviste. Elle a été rappelée mais pas pour se faire offrir le poste qu’elle désirait.
« Ils avaient vu dans mon CV que j’avais un bac en études françaises, comme on appelait cela à l’époque, et que j’avais fait un peu de suppléance pour pouvoir survivre, a-t-elle narré. J’ai été les rencontrer, ils m’ont donné des boîtes de livres et quelques jours plus tard, je débutais en tant qu’enseignante. Je ne suis jamais partie. »
De la poly à la rue Wilson
C’est donc en janvier 1990 qu’Hélène Proulx commence sa carrière d’enseignante de français à l’éducation aux adultes. À l’époque, le Centre de formation générale des adultes Le Parallèle, comme on l’appelle aujourd’hui, n’existait pas en tant que tel.
« On avait deux locaux dans un corridor de la polyvalente Lavigne, se souvient la principale intéressée. J’y ai vu les balbutiements de ce qui allait être plus tard Le Parallèle. »
En effet, au fil des ans, le volet de l’éducation aux adultes de la commission scolaire prend de l’expansion : celui-ci est déménagé tour à tour à l’ancienne école primaire Immaculée-Conception du quartier Ayersville, dans l’ancienne école secondaire Monseigneur-Lacourse puis, finalement, dans l’ancienne école primaire Saint-Julien, sur la rue Wilson, où il se trouve toujours.
Parallèlement, à la fin des années 90, la Commission scolaire du Long-Sault est fusionnée avec d’autres pour former la Commission scolaire de la Rivière-du-Nord, aujourd’hui devenue centre de services scolaire. Le bassin de population desservi par Le Parallèle devient ainsi plus important, ce qui augmente le nombre d’élèves.
La passion
Malgré tous ces changements, Hélène Proulx a continué à enseigner le français, elle qui a aussi touché un peu aux mathématiques et à l’anglais. Qu’est-ce qui explique qu’elle ait poursuivi aussi longtemps dans cette carrière qu’elle n’avait originellement pas prévue?
« Il y a d’abord la passion du français mais aussi le contact avec les élèves, a-t-elle confié. Il y avait ce pouvoir que j’avais d’amener l’élève à se dépasser, à se découvrir et à aller plus loin. À l’époque, j’étais souvent la plus jeune de la classe! J’étais l’enseignante mais les élèves étaient de vrais adultes : des gens sur l’assurance-chômage, des gars qui avaient quitté leur emploi, des grands-mères qui avaient le goût de se renouveler… »
Elle admet que ce fut le coup de foudre pour cette profession d’enseignante dès ses premiers jours en classe, grâce à ce contact avec ses étudiants. C’est d’ailleurs ce qui va le plus lui manquer au moment de partir à la retraite, ça et ses collègues.
Le 22 mai dernier, lors de la cérémonie des méritas du Parallèle, ces derniers lui ont d’ailleurs rendu hommage devant toute l’école.
« C’était touchant. J’ai toujours eu l’impression, comme à mes débuts, que je n’étais pas une vraie enseignante, une imposteure… Mais j’ai découvert au bout de quelques mois que j’étais sur mon ‘X’. Se lever chaque matin et avoir le goût d’aller au travail, c’est précieux. »
Le 27 juin prochain sera la dernière fois où Hélène Proulx fermera sa classe pour les vacances estivales. Elle admet que ce moment sera probablement fort émouvant.
« À chaque fin d’année, j’ai mon rituel lorsque je ferme ma classe, a-t-elle ajouté. Là, je sais que ça va être émouvant mais ce sera aussi un soupir de soulagement. J’ai plein de projets pour la suite des choses! »
