Le commissaire réprimande l’Ontario pour son manque de publicité bilingue

Par Joseph Coppolino
Le commissaire réprimande l’Ontario pour son manque de publicité bilingue
Une enquête menée par le commissaire aux services français sur l’utilisation des deux langues officielles dans les campagnes publicitaires de Covid-19 et d’autres campagnes de santé publique utilisant des espaces publicitaires extérieurs tels que des panneaux d’affichage révèle que seulement 3 des 17 campagnes offraient une composante française, et que seulement 5 % des budgets publicitaires des campagnes sont consacrés aux communautés francophones. (Photo : Ontario Ombudsman, X)

Le commissaire aux services en français de l’Ontario, Carl Bouchard, du bureau de l’Ombudsman de l’Ontario, a révélé une défaillance systémique au sein du gouvernement provincial en ce qui concerne l’affichage en anglais et en français de la publicité sur la santé publique pendant la pandémie de Covid-19 et d’autres campagnes sur la santé.

Un rapport d’enquête analysant 17 différentes campagnes de publicité extérieure – comprenant des panneaux d’affichage, des panneaux électroniques, des publicités dans les bus et les abribus – déployées par la province entre avril 2020 et mars 2023, révèle que seulement trois de ces campagnes contenaient des messages en français.

« Par conséquent, la plupart des messages dans les espaces publics concernant des questions de la plus haute importance pour la population ontarienne durant les trois années de COVID-19 – y compris l’information sur la façon de rester en sécurité et en bonne santé pendant la crise sanitaire – n’étaient communiqués qu’en anglais, laissant les francophones sans l’information cruciale dont ils avaient besoin pour leur santé «, a déclaré M. Bouchard dans le rapport intitulé «Messages manqués».

En plus de l’absence de communication en français pour la publicité de la province sur Covid-19 et la vaccination, le rapport a constaté que d’autres campagnes de santé publique manquaient également d’une composante française. Une campagne portant sur le dépistage du cancer et l’importance de la détection précoce du cancer du côlon n’a pas inclus de publicité en français. Une deuxième campagne promouvant le dépistage des cancers du sein, du col de l’utérus et du côlon ne comportait pas non plus de publicité en français.

L’enquête révèle des problèmes systémiques

L’enquête de M. Bouchard a révélé qu’un accord informel entre le personnel des ministères signifiait qu’une “considération générale est accordée à l’allocation d’au moins 5 % du budget publicitaire total pour atteindre les francophones”, selon le rapport. Cependant, aucun des ministères n’a mis en place un processus formel pour prendre en compte la Loi sur les services en français – qui stipule que les ministères et organismes provinciaux doivent offrir des communications en français équivalentes à celles offertes en anglais “en même temps et de la même qualité”, selon le rapport – dans leurs documents d’information stratégiques.

La notion de 5 % du budget d’une campagne publicitaire destiné à la communauté francophone n’est inscrite dans aucune loi ou acte, selon le rapport de M. Bouchard, mais était une règle informelle liée à l’idée qu’environ 5 % de la population de la province est francophone. Cependant, M. Bouchard souligne dans son rapport que la Loi sur les services en français ne fait aucune référence à la population de la communauté ou du territoire français de l’Ontario.

«En vertu de la Loi, les communications émanant de l’administration centrale du gouvernement, y compris les communications publicitaires émises en vue de la prestation d’un service, doivent être diffusées en français. La Loi sur les services en français ne fait aucune référence à des quotas budgétaires ou à la possibilité de limiter les services fournis en français en fonction du pourcentage de francophones en Ontario», peut-on lire dans le rapport. «Dans l’affaire Lalonde, qui a fait jurisprudence – concernant une réduction substantielle des services de santé en français – la Cour d’appel a averti que le gouvernement ne pouvait pas «invoquer simplement la commodité administrative et de vagues préoccupations de financement» pour justifier une telle mesure.

La publicité dans les deux langues n’est pas impossible

M. Bouchard a fait remarquer que malgré l’incapacité de la province à satisfaire aux exigences de la Loi sur les services en français, les campagnes publicitaires des ministères et organismes fédéraux ainsi que d’autres juridictions ont prouvé qu’il est en fait possible de diffuser des messages dans les deux langues d’une manière qui respecte la Loi.

Les messages fédéraux concernant Covid-19 au cours de la même période ont été diffusés dans les deux langues officielles, l’anglais et le français occupant une place égale. En dehors de l’Ontario, comme pour le gouvernement fédéral, le Nouveau-Brunswick a mis en place des règles et des normes pour assurer la publication de la publicité gouvernementale en français et en anglais. Des normes sont également en vigueur dans d’autres pays. Le rapport cite le Pays de Galles, où les deux langues officielles, l’anglais et le gallois, sont traitées sur un pied d’égalité dans les publicités gouvernementales.

Recommandations

Le rapport formule plusieurs recommandations sur la façon dont les ministères et organismes provinciaux pourraient mieux respecter les exigences de la Loi sur les services en français.
La première recommandation, et la plus notable, est que toutes les publicités extérieures soient affichées simultanément en français et en anglais.

Parmi plusieurs autres recommandations sur la formation et la sensibilisation à la Loi sur les services en français, le rapport recommande que le ministère des Affaires francophones inclue des normes spécifiques concernant l’affichage extérieur «pour s’assurer que le même message, de qualité égale, est communiqué en français et en anglais en même temps» et qu’il offre une formation sur les nouvelles normes aux services publics responsables de l’affichage.

Si toutes les recommandations visant à améliorer la sensibilisation et la formation ont été acceptées par le gouvernement, les principales recommandations visant à créer des normes spécifiques pour la diffusion des communications en français et à garantir que toutes les publicités soient bilingues restent «à l’étude», selon le commissaire.

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