La PDG du Collège La Cité à Ottawa craint que le cap sur les étudiants étrangers annoncé par le l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté (IRCC) aura un effet néfaste sur le nombre de programmes en français que peut offrir l’institution post-secondaire à la population franco-ontarienne.
Le 22 janvier, le ministre fédéral de l’immigration, Marc Miller, a annoncé une limite de deux ans sur l’inscription des étudiants étrangers dans les établissements d’enseignement post-secondaire afin de refroidir la demande de logements locatifs et réglementer un système qui a « perdu le contrôle » en permettant à des institutions privées d’augmenter leur nombre d’étudiants étrangers pour accroître leurs revenus.
Ce plafond réduira de 35 % le nombre de nouveaux permis d’études pour les étudiants étrangers.
« Le cap affecte tous les collèges, explique Lise Bourgeois, PDG du Collège La Cité à Ottawa. Quand ça a un effet sur les collèges de la majorité, c’est toujours un impact double pour les institutions francophones. »
D’après Mme Bourgeois, le cap sur les étudiants étrangers pourrait avoir un effet néfaste sur le nombre de programmes offerts dans son institution. Les étudiants étrangers sont une source de revenue importante pour les institutions post-secondaires en Ontario. Pour La Cité, le cap sur les étudiants étrangers pourrait marquer une perte de 10 000 000 $ si l’institution devait couper de 50% ses admissions d’étudiants étrangers.
« Si c’est appliqué sans modelage, les revenus qu’on recevait avec les étudiants étrangers nous permettaient d’offrir et de soutenir davantage de programmes, explique-t-elle. »
De plus, sans les étudiants étrangers, certains cours n’obtiendraient pas suffisamment d’inscriptions pour justifier leur existence. Le résultat final étant que ces cours ne seraient plus accessibles en français en Ontario, a déclaré Mme. Bourgeois
Les plus de 3 000 étudiants étrangers Francophones au Collège La Cité sont aussi une source de main-d’œuvre francophone et jouent un rôle clé en veillant à ce que les services, tels que les soins de santé, puissent continuer à être fournis en français dans la province.
« Est-ce qu’on va considérer le fait qu’on est les seuls qui peuvent offrir des formations pour le marché de l’emploi francophones? a-t-elle demandé. »
D’après Mme Bourgeois, c’est 1 500 étudiants internationaux par année en moyenne qui obtiennent leur diplôme de la Cité et qui s’établissent au Canada et entrer sur le marché du travail.
Associations Francophones
L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) a d’ailleurs demandé au gouvernement fédéral d’exempter les établissements postsecondaires francophones de l’Ontario du cap sur les permis d’études pour étudiants étrangers.
« En plus d’ajouter un défi financier important à nos institutions, cette décision freine notre communauté dans son défi de faire face à la pénurie de main-d’oeuvre francophone et bilingue, qui est possiblement la plus grande menace de nos services en français », a exprimé le président de l’AFO, Fabien Hébert.
L’Association des Collèges et Universités Francophones du Canada (ACUFC) voit des contradictions entre le plafond et une politique dévoilée le 16 janvier dernier, selon laquelle IRCC souhaite maximiser la sélection d’étudiants francophones provenant de l’extérieur du Québec.
Pour l’ACUFC, une mesure positive serait de considérer les étudiants étrangers francophones des établissements postsecondaires en contexte francophone minoritaire comme étant une cohorte prioritaire.
Règlementation
Le nombre d’étudiants admis sera administrés aux provinces selon leur populations. Les provinces pourront ensuite décider comment le cap est distribué dans leur propres institutions post-secondaires.
Mme Bourgeois, il serait important que le gouvernement Ontarien adopte une formule qui prends en compte les différentes régions, la francophonie et la taille des institutions dans l’allocation du nombre d’étudiants admissibles par établissement d’éducation post-secondaire.
« On attends la décision mais on fait beaucoup d’interventions auprès de notre ministère, de notre gouvernement pour les sensibiliser aux différences qu’il y a dans les régions, » a-t-elle affirmée.
Les provinces qui prennent présentement un plus grand nombre d’étudiants étrangers, notamment l’Ontario, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique, seront plus grandement affectées par le cap imposé. Le Québec serait encore en mesure d’augmenter le nombre d’étudiants étrangers d’après le ministre.
À compter du 1erseptembre 2024, les étudiants étrangers qui commencent un programme d’études faisant partie d’un accord d’utilisation des programmes d’études ne seront plus admissibles à un permis de travail post-diplôme à la fin de leurs études. Dans le cadre des accords d’utilisation des programmes d’études, les étudiants qui fréquentent physiquement un collège privé autorisé à offrir le programme d’études d’un collège public affilié. Ces programmes ont connu une croissance importante pour ce qui est d’attirer des étudiants étrangers au cours des dernières années, bien qu’ils soient moins surveillés que les collèges publics et qu’ils permettent d’exploiter une faille en ce qui concerne l’admissibilité au permis de travail post-diplôme.
D’ailleurs, les étudiants aux études supérieures ainsi que les étudiants en médecine et en droit ne compteront pas sur le cap. « Ce sont les personnes brillantes que nous devons retenir » a affirmé le ministre Miller.
Le cap n’affectera pas les étudiants internationaux qui veulent continuer ou étendre leurs études au Canada.
Le nombre de demandes approuvés pour 2025 sera réévalué à la fin de l’année.