La chance joue parfois dans le parcours d’un artiste. La chance ou le karma, c’est selon. Louise Doyon en sait quelque chose qui expose jusqu’au 7 février au Centre d’art d’Argenteuil.
C’est en effet grâce à un concours de circonstances que les œuvres de Louise Doyon se sont retrouvées sur les murs de la galerie/ boutique de la rue Principale. Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Une artiste se désiste, une autre la remplace.
C’est dire que le 27 janvier dernier, Louise rayonnait de bonheur au milieu de ses invités au vernissage d’une vingtaine de ses œuvres.
Louise Doyon peint depuis une dizaine d’années. Infirmière de profession elle a pris une retraite anticipée parce qu’elle voulait consacrer profiter d’une bonne forme physique pour explorer une autre forme d’existence. Elle ressentait chez elle un besoin de besoin d’exprimer des choses que son métier ne lui permettait pas de faire.
Fascinée depuis toujours par les arts visuels, elle s’essaie à la peinture, mais l’expérience la déçoit car sa main n’obéit pas à son œil. Elle se rend compte que le dessin n’est pas sa tasse de thé. Peut-être parce qu’elle y est venue trop tard. Allez savoir. Quoi qu’il en soit, le besoin et le désir de la création la préoccupe. Elle transforme les objets qui l’entourent, elle détourne les cailloux, le bois de grève, les feuilles mortes. Puis, au hasard d’un atelier, elle découvre la peinture abstraite. Les choses deviennent subitement claires : elle vient de découvrir son médium. Et elle s’y plonge sans retenue.
C’est surtout la découverte de la couleur qui la fascine. Elle se rend compte que cette dernière possède le pouvoir presque magique d’exprimer des émotions qui jusque-là n’avaient pas dit leur nom. Louise n’emploie pas le mot thérapie, mais on comprend que c’est bien de cela qu’il s’agit lorsqu’elle parle de la joie qu’elle éprouve à étaler les couleurs sur la toile et de l’apaisement que lui procure l’œuvre achevée.
La couleur, mais aussi le geste.
Louise s’inscrit dans la pratique du mouvement automatiste des années 40 qui affirmait qu’aucune intention ne précédait la création de l’œuvre et que le résultat final était une manifestation de l’inconscient de l’artiste. Le geste exprime ce que l’artiste ressent. Le jugement, l’entendement, ou si on veut l’intelligence cognitive ne devrait pas jouer de röle dans la création.
« Je ne sais pas ce que je vais faire, quand je peins; je peins et c’est tout, Puis, vient un moment où je sens que le tableau est fini. Alors, il ne m’appartient plus » D’ailleurs les titres que Louise donne à ses œuvres (Audacieuse, Rêve, Belle) sont davantage des points de repère pour les distinguer les unes des autres plutôt que des pistes d’exploration pour le spectateur. Les titres volontairement vagues incitent ce dernier à découvrir sa propre interprétation de ce qu’il voit.
« Mes tableaux se ressentent, dit Louise Doyon, ils n’expliquent rien. »
Une des invitées au vernissage, un horticultrice, a vu dans un des tableaux un paysage fleuri. Un autre, une évocation de la côte ouest du Canada. Un autre encore, l’expression explosive d’une violence réprimée.
Il est vrai que la violence n’est pas exclue de ces toiles dont les gestes brusques contrastent avec la douceur des couleurs, des verts tendres et des jaunes paille. Curieusement, c’est le blanc dominateur dans plusieurs de ces tableaux qui témoigne de la vivacité de certains traits. Celle-ci traduit-elle la colère ou au contraire l’exubérance et l’enthousiasme, la rage ou le contentement. Chacun y voit sans doute ce qu’il veut bien y voir et les œuvres de Louise Doyon en disent peut-être plus long sur ceux qui les regardent que sur celle qui les a peints.