Le Café mortel: la mort vue par le Mexique

Par Antoine Messier
Le Café mortel: la mort vue par le Mexique
Sur la table, au centre de tous les participants. se trouvent des objets variés représentant le feu, l’eau, la terre et l’air, tel un autel dédié aux morts. (Photo : Antoine Messier)

Le Centre culturel le Chenail a accueilli, dimanche dernier, Gabriel Garcia du Centre pour l’immigration en région, pour partager un brin de la culture mexicaine et discuter d’un concept qui nous relie inévitablement tous, la mort.

Partout à travers le monde, chaque année, des groupes se forment pour discuter de la mort. De Vienne à Chicago, les groupes de discussions sans ordre du jour ont comme but de sensibiliser les gens à la mort dans le but d’améliorer leur qualité de vie, autour d’un café et d’une part de gâteau.

À Hawkesbury, c’est Gabriel Garcia qui a présenté la mort telle que perçue dans la culture mexicaine, en commençant par les plus anciennes croyances aztèques jusqu’aux changements survenus à ces croyances après l’arrivée des Chrétiens européens.

Avant la conversation, M. Garcia a fait appel à tous ceux voulant se joindre, dans le monde vivant et dans le monde immatériel, si l’on ose y croire, à l’aide d’une conque. Puis il a entonné un chant en Nahuatl, la langue que parlaient ses ancêtres aztèques, avant de purifier les participants à l’aide d’un encens fait de résine de copal, de tabac et de sauge, pour s’aligner avec la nature.

Au centre de tous les participants se trouvait une table avec des objets variés représentant l’air, le feu, l’eau et la terre, tel un autel dédié aux morts. Quand tout fut prêt, la conversation a pu commencer.

Gabriel Garcia utilise une conque pour faire appel à tous ceux présents, dans notre dimension ou dans le monde des morts, pour participer à la conversation. (Photo: Antoine Messier)

La vie et la mort

Pour Gabriel Garcia, la vie et la mort sont une dualité comme l’homme et la femme, le jour et la nuit, l’eau et le feu. Ce sont deux concepts indissociables. Il n’y a pas de vie sans mort et il n’y a pas de mort sans vie.

Pourtant, la tradition aztèque croit aussi en une vie après la mort, une suite au parcours de l’esprit. « Dans nos traditions, on est plus que simplement un corps, a expliqué M. Garcia. Quand on meurt, c’est le corps matériel qui meurt. Après la mort, il y a un retour à la vie, tel un cycle complémentaire et continu. »

Alors que M. Garcia expliquait les conceptions aztèques de la vie et la mort, les participants attentifs notaient les différences culturelles mais aussi les ressemblances de leur propre culture. Dans la vision occidentale, la mort marque une fin, le paradis, un but ultime.

Les Aztèques aussi avaient un but ultime à la vie d’après M. Garcia. Ils voulaient devenir des êtres de lumière, chose qui pouvait être accomplie par la guerre et par la défaite de son pire ennemi, soi-même.

Après ces conversations spirituelles, les esprits divaguent vers des conversations plus banales comme les places de stationnement dans les cimetières des municipalités environnantes, comme pour prendre une pause de l’apprentissage en cours, mais reviennent rapidement aux choses sérieuses.

Les traditions changeantes

Les mentalités ont bien changé au Mexique depuis 500 ans. Cette perspective autrefois prédominante s’est lentement substituée à la pensée chrétienne ou s’y est amalgamée pour créer un mélange des deux croyances hétérogènes dans tout le pays. Les croyances aztèques se perdent, particulièrement dans les grandes villes, où la vision cosmopolitaine de la vie prédominant en occident s’est déjà enracinée, influencée par les médias, l’immigration et le tourisme international.

Depuis l’arrivée des Européens en Amérique, les représentations des Dieux aztèques se sont assimilées aux icônes du christianisme, à cause d’un processus qu’on appelle le syncrétisme religieux. Lors de la fête des morts en début novembre, on utilise des symboles chrétiens et on pose la croix sur les autels dédiés aux morts.

Mais le Mexique garde pourtant une part de tradition qui date de bien avant l’arrivée des Espagnols. Une tradition différente pour tous, qui change à chaque ville et chaque village, peut-être même pour chaque individu. C’est la tradition d’une langue perdue, d’un empire déchu. Cette tradition est racontée par Gabriel Garcia et par d’autres Mexicains, dans un effort de la préserver, de la partager et de l’enseigner, pour que ses idées puissent servir quand il s’agit de penser à la mort.

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