Une facture trop salée pour un pont temporaire

Par Karine Audet
Une facture trop salée pour un pont temporaire

Il y a tout d’abord eu les inondations successives, trois en moins de 7 ans, des problèmes d’approvisionnement en eau avec son réseau d’aqueduc, et maintenant, le scindement de la ville en deux parties pour la réfection d’un tout petit pont, quasiment fantôme, mais ô combien nécessaire. Le pont 00324 relie la partie sud et nord pour les quelque 3000 habitants. Cette route provinciale sert aussi à la circulation de nombreux véhicules provenant d’Oka (par l’est) et de Grenville (par l’ouest) qui y transitent chaque jour.  

Annoncée à l’automne dernier, la réfection du pont par le Ministère des Transports et de la mobilité durable (MTQ) avait alerté les élus, les citoyens et les commerçants, qui s’étaient mobilisés. La réalisation d’un pont temporaire au coût de 50 000$ avait alors été envisagée par le conseil, qui a octroyé un montant de 75 000 dollars à son budget 2023. Le conseil a travaillé très fort auprès du MTQ pour obtenir la permission d’y faire une voie de contournement. 

  Voilà 3 semaines, une nouvelle étude estime plutôt les coûts d’un pont temporaire à plus de 300 000 dollars, a déclaré le maire de St-André d’Argenteuil mardi soir dernier au sous-sol de l’église. Bien que la députée provinciale Agnès Grondin ait accepté d’y investir l’ensemble de son budget discrétionnaire de 75 000$ (budget pour des infrastructures routières seulement), le conseil a tranché que payer cette somme pour un pont temporaire serait irresponsable. Déjà que les premiers 75 000 dollars investies dans une infrastructure temporaire faisaient sourciller quelques mécontents. 

«Ce sont des décisions qui sont toujours difficiles à prendre, mais quand on entre en poste, qu’on choisit d’être un élu municipal, on doit choisir les meilleures décisions pour l’ensemble des citoyens. On sait que les gens ont déjà de la misère à vivre les augmentations qui viennent de partout», a déclaré le maire Stephen Matthews, qui estimeraient à plus de 10% l’augmentation du compte de taxes. Malgré tout, les citoyens défilaient les arguments pour trouver des solutions, s’insurgeant surtout des délais de construction pour un si petit pont.   

Bien que M. Matthew accepte lors de la réunion de faire une dernière approche auprès de l’armée canadienne, le temps presse et les énergies seront investies à faire l’élaboration d’un plan B pour rendre ce mal nécessaire moins douloureux, surtout pour faciliter les répercussions directes sur les citoyens étant de l’autre côté du ruisseau de la branche de la rivière du Nord (jusqu’à Saint-Placide). Le détour pouvant représenter jusqu’à 30 minutes de route supplémentaire. 

On estime à 22 semaines le temps de fermeture totale à la circulation routière du pont, soit du 5 juin prochain jusqu’en novembre 2023. C’est dire que les entraves affecteront aussi les commerces du village, qui ont peine à sortir des répercussions de la COVID.  Comme solution, la première partie des travaux effectués par le MTQ sera un chemin de traverse pour les piétons, les cyclistes, ainsi que les bicyclettes électriques.  On spécifie toutefois que ni les scooters ni tous types de motos n’auront accès à ce passage.  Des ententes pour faciliter le stationnement des voitures de l’autre côté du pont sont en train de se concrétiser.  Une démarche avec la MRC pour un service de navette est envisagée. On évoque aussi la possibilité d’investir dans des événements majeurs pour attirer les touristes. 

Par la présence d’une nouvelle responsable des communications, le conseil assure que le site Internet sera à jour pour une communication efficace et transparente tout au cours des travaux. Le maire invite les citoyens à s’informer et consulter le site de Saint-André d’Argenteuil ainsi que celui du MTQ pour mieux préparer leurs déplacements. 

Le Service de sécurité des incendies assurent que tout sera mise en œuvre pour obtenir les services des pompiers en moins de 22 minutes en positionnant un véhicule en tout temps de l’autre côté du pont.  De plus, des ententes avec les villages environnants sont près d’être signées. 

Quant à la possibilité que les travaux puissent s’étirer, le maire ajoute: «Je vous donne 3 lettres, MTQ». Décidément, M. Matthews ne semble pas impressionné par la qualité des relations avec les responsables du MTQ des Laurentides. «Peut-on faire pression, y a-t-il un numéro de téléphone auquel on peut appeler?», s’insurge une citoyenne. Plusieurs estiment que la députée provinciale ne ferait pas assez de pression pour assurer une vitesse dans les travaux et d’autres ont mentionné que le député fédéral Stéphane Lauzon n’était même pas au courant de la situation. On estime que les routes empruntées pour les détours pourraient représenter un danger, surtout que plusieurs d’entre elles sont occupées par de la machinerie agricole.  On rappelle un accident mortel sur le chemin de la rivière Rouge entre un automobiliste et une machinerie qui occupait toute la largeur du chemin. 

À la lumière d’une étude commandée par l’Union des municipalités du Québec, la firme WSP estime que les coûts des municipalités atteindront plus de 2 milliards de dollars par année d’ici la prochaine décennie. Les infrastructures routières représenteraient environ 43% des besoins en financement d’ici 2035. C’est dire que Saint-André d’Argenteuil ne sera pas le seul village à devoir se serrer la ceinture et à faire davantage avec moins. 

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