Cela aura pris beaucoup moins de temps que lors des deux scrutins précédents: vers 22h30 le 28 avril, Radio-Canada annonçait la victoire du libéral Stéphane Lauzon dans Argenteuil-La Petite-Nation. Le député sortant retournera donc à Ottawa pour un quatrième mandat consécutif.
Contrairement aux deux précédents scrutins, monsieur Lauzon a obtenu une confortable avance de près de 13 500 voix (total de 28 129 votes) sur son plus proche adversaire, le conservateur Martin Charron (14 697 voix). Le bloquiste Martin Héroux suivait en troisième place à un peu plus de 1100 voix de monsieur Charron (13 526 voix). Le néo-démocrate Michel Welt a récolté 1502 voix tandis que les candidates du Parti vert et du Parti populaire n’ont obtenu que 807 et 590 voix respectivement.
Rappelons qu’en 2019 et 2021, monsieur Lauzon avait dû patienter jusqu’à 1h du matin pour que sa victoire soit confirmée, alors que la lutte s’était chaque fois révélée serrée avec le candidat d’alors du Bloc québécois. Cette fois-ci, la victoire fut sans équivoque alors qu’il n’aura fallu attendre qu’une heure après la fermeture des bureaux de vote pour confirmer le 4e mandat de monsieur Lauzon. Avec 47,5 % des votes exprimés en sa faveur, il obtient ainsi un meilleur résultat qu’en 2015 alors qu’il avait recueilli 43,26 % des voix.
« Je suis vraiment touché. C’est une histoire d’amour qui dure depuis 2015 et même après dix ans, vous me faites encore confiance, a lancé le député fraîchement réélu dans son discours de la victoire devant une soixantaine de partisans réunis dans un bar de Plaisance. Je vais continuer à vivre mon rêve de servir les gens d’Argenteuil-La Petite-Nation et d’être présent pour eux. C’est quelque chose que j’adore. »
Il en a profité pour remercier ses bénévoles et sa famille ainsi que Paulette Lalande, ancienne préfète de la MRC de Papineau, qui l’avait convaincu de se lancer en politique fédérale il y a dix ans.
« Avec 35 jours, ce fut la campagne la plus courte de ma carrière mais ce fut la plus émotive. Je suis content que mes frères, ma femme, mes filles et mes gendres soient là mais il me manque une personne : ma sœur Sylvie, a-t-il poursuivi avant de s’interrompre quelques secondes, visiblement ému. J’ai pensé à elle chaque fois que j’ai croisé la porte de mon local électoral. C’était ma bénévole numéro un que l’on a perdue l’an dernier. Merci ma sœur! »
L’effet Trump
Monsieur Lauzon indique que plusieurs facteurs ont contribué à sa victoire, notamment sa présence sur le terrain et le bilan de ses trois mandats précédents. Cependant, il concède qu’il y a eu un effet Mark Carney, dont l’arrivée à la tête des libéraux fédéraux a permis de renverser la vapeur face au Parti conservateur, et un effet Donald Trump, dont les commentaires et actions vis-à-vis du Canada ont eu un impact probable sur le vote des électeurs.
« Il y a le facteur Mark Carney et la situation avec les États-Unis qui ont fait en sorte que les gens ont voulu me faire encore confiance, concède-t-il. Les gens nous ont dit clairement d’aller nous battre contre Trump. On sera là avec des joueurs clés pour contrer les tarifs imposés. On va continuer à mettre de la pression pour être un Canada fort! »
Outre la lutte aux tarifs américains, monsieur Lauzon indique que pour son prochain mandat, il voudra travailler avec les municipalités pour la construction de logements ainsi que sur le projet de train de passagers entre Montréal et Ottawa. Il indique aussi qu’il travaillera sur le dossier de la sauvegarde de la Caserne de Carillon, dévoilant qu’il avait reçu des esquisses pour les futurs travaux de rénovations du bâtiment.
Comme son parti se dirigeait vers un gouvernement minoritaire pour la troisième fois de suite, le député, qui fêtait la veille son 59e anniversaire, a indiqué qu’il allait être prêt à travailler de concert avec le NPD et le Bloc québécois pour faire avancer les dossiers. Cependant, ce quatrième mandat pourrait aussi être son dernier.
« J’ai eu 59 ans hier et dans quatre ans, j’en aurai 63. Comment bien terminer une carrière politique avec une vague d’amour comme celle-là?, a-t-il lancé avant de préciser que sa décision n’était cependant pas coulée dans le béton. C’est sûr que j’y pense. Je suis en forme mais il faut profité de la vie quand on l’est. Je vais avoir 63 ans dans quatre ans alors il faut peut-être commencé à penser à la fin [de ma carrière politique]. »
La peur, un facteur?
Quelques kilomètres plus loin, dans un autre bar de Montebello, les visages étaient quelque peu plus longs au rassemblement électoral du Bloc québécois. Le candidat bloquiste Martin Héroux indiquait prendre cette défaite avec un grain de sel, même si sa candidature se retrouvait au troisième rang derrière celle du candidat conservateur.
« C’est une élection hors norme. Des choses pouvaient se passer, ça aurait pu changer de côté comme ce fut le cas il y a quelques mois, a-t-il déclaré. Mais je pense que le levier de la peur a été très bien utilisé par les libéraux. Le cynisme qui était présent avant les fêtes est resté mais a changé de bord. Les gens ont eu une réaction de peur qui était tout à fait normale. »
Pour le candidat défait, même avec un nouveau chef, le prochain gouvernement libéral ne sera pas différent du précédent puisque le autres acteurs seront les mêmes d’après lui. Il ajoute que l’on a trop parlé de Donald Trump dans cette élection et pas assez d’autres enjeux.
« C’est dommage pour les Québécois et les Canadiens qui voulaient se débarrasser de ce gouvernement-là, poursuit-il. Trump n’est qu’un problème passager même s’il est grave. Il faut être à la table pour discuter de cela mais là où on a manqué le bateau, c’est qu’il n’y aura pas un grand nombre de membres du Bloc québécois à cette table pour défendre nos intérêts. »
Notons que le taux de participation à ce scrutin dans Argenteuil-La Petite-Nation fut de 63,88 %, ce qui est légèrement supérieur au taux de 61,19 % obtenu en 2021 et au taux de 63,37 % de 2019.
Précisons en terminant que les municipalités de Wentworth, Mille-Isles et Gore sont désormais rattachées à la nouvelle circonscription des Pays-d’en-Haut. Là aussi, c’est le candidat libéral, l’actuel maire de Morin-Heights Tim Watchorn, qui a été élu. Monsieur Watchorn devrait démissionner de son poste de maire dans les jours qui viennent.