La fin pour La Route des arts?

Par Francis Legault
La fin pour La Route des arts?
La Route des arts est un circuit touristique dans lequel le public est invité à visiter des artistes et artisans de la région directement dans leurs ateliers pour découvrir leurs façons de faire. Sur la photo, Mélanie Forest, artiste potière de Lachute, lors du passage de L’Argenteuil en juillet dernier dans le cadre de la Route des arts 2024. (Photo d’archives)

Après 25 ans d’existence, La Route des arts (RDA) pourrait bien être arrivée dans un cul-de-sac. En effet, dans l’impossibilité de trouver assez de membres pour composer son conseil d’administration, l’organisme a entamé les procédures qui le mèneront à sa dissolution l’été prochain, à moins qu’un miracle ne survienne.

La nouvelle a été annoncée sans tambour ni trompette au terme de la dernière assemblée générale annuelle de l’organisme en octobre dernier : un simple message sur le site web de la RDA annonce que les activités de celle-ci sont suspendues pour 2025, sans autres précisions. Un court message sur la page Facebook de la RDA, publié le 20 janvier dernier, confirme que le processus de dissolution est en cours.

Rappelons que la Route des arts est un circuit touristique dans lequel le public est invité à visiter des artistes et artisans de la région directement dans leurs ateliers pour découvrir leurs façons de faire. Chaque année pendant une semaine, entre 20 et 30 artistes d’Argenteuil et du sud-ouest des Basses-Laurentides accueillent ainsi les visiteurs.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas tant le manque d’intérêt des artistes à prendre part à ce circuit que leur désintérêt à être membre de son conseil d’administration qui est la cause de la mort annoncée de la RDA.

« Cette année, on avait plusieurs membres qui devaient quitter le CA pour diverses raisons mais on n’en a pas eu assez pour prendre la relève, explique Louise Houle, membre du conseil d’administration de la RDA depuis quatre ans. Comme on n’a pas pu constituer un nouveau CA, on a procédé à un vote pour la dissolution de l’organisme et on est dans ce processus. Ça va se faire au plus tard le 30 septembre prochain, à moins qu’un miracle ne se produise durant l’année. »

De la relève mais pas pour le CA

Danielle Roy, artiste de la RDA et qui était membre de son conseil d’administration jusqu’en octobre dernier, confirme que l’intérêt des artistes à participer au circuit touristique est toujours bien vivant.

« On avait des gens qui ont donné leur nom pour participer cette année [pour la première fois], confirme-t-elle. C’est dommage mais c’est dur présentement pour les organismes à but non lucratif gérés par des bénévoles. Ça prend beaucoup de bonne volonté. Oui, on a des subventions mais ça prend des gens pour faire rouler la machine. »

« Les jeunes artistes veulent participer à la RDA mais ils n’ont pas de temps pour faire du bénévolat, renchérit madame Houle. C’est difficile pour eux de travailler et de se préparer à faire la Route. C’est vraiment la relève [pour faire partie du CA] qui manque. »

Notons que dans les règlements de la RDA, le conseil d’administration, composé de sept membres, doit minimalement compter quatre artistes. Il était donc difficile pour l’organisme de trouver des gens intéresser à faire partie du CA tout en correspondant au profil recherché.

Aussi, la RDA ne compte aucun employé, ce qui fait que toutes les tâches administratives, la recherche de commanditaires, le recrutement des nouveaux membres et les communications incombaient aux membres du CA, ajoutant de la lourdeur au rôle des administrateurs.

« Pour connaître l’implication nécessaire, il faut vraiment être dedans, illustre madame Houle. On n’a pas fait de cachette aux membres : dans les rencontres de CA, on ne se conte pas nos fins de semaine, on travaille. En tant que secrétaire du CA, j’avais des courriels à propos de la RDA à tous les jours, toute l’année. C’était pire pour la présidence. Il faut vraiment le vouloir pour être là. »

Revoir le modèle?

Malgré l’intérêt des nouveaux artistes à prendre part à la RDA, Louise Houle souligne que l’achalandage dans les ateliers durant l’événement était à la baisse au cours des dernières années.

« Les événements culturels se multiplient, on fait face à plus de concurrence, affirme-t-elle. Les gens sont sollicités partout. Et avec les réseaux sociaux, combien y a-t-il d’artistes qui vont se faire voir sur Internet à la place? »

Madame Houle confirme que l’organisation était prête à revoir sa façon de faire en 2025, peut-être en ne tenant la RDA que durant deux fins de semaine au lieu d’une semaine complète. Mais l’absence de conseil d’administration a torpillé le projet.

Comme mentionné plus haut, la dissolution que la RDA devrait être terminée au plus tard le 30 septembre prochain. D’ici là, seul un miracle pourrait empêcher la disparition de l’organisme et cela pourrait passer par la récupération de celui-ci par une institution municipale.

En effet, Louise Houle cite en exemple La Virée des créateurs, un concept identique à la Route des arts mais limité aux artistes de la municipalité de Val-David. C’est d’ailleurs cette dernière qui organise l’événement.

« Il y a quelqu’un qui est payé par la municipalité pour organiser ça. Nous, on n’est que des bénévoles, déplore-t-elle. Il faut avoir l’aide des municipalités. Il faudrait que dans les politiques culturelles des villes, si elles tiennent à leurs artistes, il faut qu’elles les aident autrement que simplement en les subventionnant. »

Les deux artistes se disent attristées par la fin annoncée de l’aventure de la RDA. « C’est déchirant mais en même temps, on se rend compte que l’on s’en va ailleurs, mentionne Danielle Roy. Les jeunes vont nous montrer un nouveau chemin. »

« C’est triste car les artistes ont besoin de visibilité, poursuit Louise Houle. On a besoin de la culture avec les temps moroses que l’on traverse présentement. La culture, c’est ce qui va nous sauver. On en a besoin pour notre moral et notre santé mentale. »

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