55 ans plus tard, le roman de Margaret Cook enfin disponible en français

Par Francis Legault
55 ans plus tard, le roman de Margaret Cook enfin disponible en français
De gauche à droite: Alexis Vaillancourt-Chartrand, enseignant en littérature au cégep de St-Jérôme, Jean-François Hamilton, président des Sentiers de Gore, et Pierre Corbeil, traducteur, étaient heureux de pouvoir enfin présenter Une Terre à nous au public francophone. (Francis Legault, EAP)

Il aura fallu plus de 55 ans mais le roman Land Possessed, de l’auteure goroise Margaret Cook, a enfin été réédité, incluant dans une version en français sous le titre Une Terre à nous. C’est l’organisme Les Sentiers de Gore qui a publié cette nouvelle édition dont le lancement a eu lieu le 26 novembre dernier.

Une Terre à nous raconte l’histoire d’amour entre une jeune anglophone protestante et un jeune francophone catholique au temps de la colonisation du secteur de Gore dans la deuxième moitié du XIXe siècle. L’auteure se serait inspirée des histoires racontées par les descendants de ces premiers colons, majoritairement d’origine irlandaise.

Margaret Cook, née Ivah Marguerite Fern Neill, s’était installée à Gore au début des années 40 avant de commencer à signer, sous son nom de plume, une chronique dans le journal anglophone lachutois The Watchman en 1949. C’est dans ce journal que son roman Land Possessed est publié sous forme de feuilleton en 1967 avant qu’il ne soit publié comme livre en 1969 par Giles Publishing, l’éditeur du journal. Jamais ce roman n’avait été réédité ou traduit avant que Les Sentiers de Gore ne décident de le faire.

« Pour moi, c’est un aboutissement, lance Jean-François Hamilton, président des Sentiers de Gore qui travaille depuis de nombreuses années à faire connaître l’œuvre de Cook. Tous les astres étaient alignés pour [réaliser ce projet]. On s’est dit qu’il fallait le faire car sinon, jamais ça ne se ferait. »

Un long travail

Créé en 2017, l’organisme des Sentiers de Gore œuvre d’abord à entretenir et développer un réseau de sentiers dans le Canton de Gore. Un autre volet de l’organisation est de tenir des activités faisant la promotion du patrimoine historique et culturel de la municipalité, comme avec la publication du roman de Margaret Cook.

Or, ce ne fut pas faute d’essayer que l’organisme n’a pu rééditer le roman Une Terre à nous avant aujourd’hui. Les droits du seul roman connu de Margaret Cook, décédée en 1975, appartenaient à sa fille unique. Celle-ci aurait d’abord accepté que Les Sentiers de Gore republient le livre avant de changer son fusil d’épaule. Après son décès en 2019, les droits ont été cédés aux petits-enfants de Cook qui, eux, semblaient plus ouverts à la proposition de l’organisation.

« Ils appuyaient le projet dès le départ, ils nous appuyaient moralement même s’ils ne voulaient pas nous faire signer de contrat, raconte monsieur Hamilton. Ils nous ont dit d’y aller et nous, on savait que l’on n’aurait pas d’embûches. »

Il s’est passé environ un an entre le début du travail de traduction et la publication de la version française du livre le 26 novembre dernier. Publié à compte d’auteur, Les Sentiers de Gore ont tenu une campagne de socio-financement qui a permis d’amasser plus de 6800 $ afin de permettre la parution du livre. Ce sont 500 copies du roman, dont la moitié dans sa version originale anglaise, qui ont été imprimées.

En attendant que le roman ne soit republié, Les Sentiers de Gore ont œuvré au cours des dernières années à faire connaître le travail de Margaret Cook dans la région. Un film documentaire sur sa vie et son œuvre a été lancé en 2021 avant qu’une biographie ne soit écrite en 2022. Aussi, une pièce de théâtre écrite en anglais en 2005 et basée sur le roman a été traduite en 2019 par l’organisme.

« Depuis 2017 que l’on développe des projets en lien avec Margaret Cook, rappelle Jean-François Hamilton. C’est un personnage historique qui a comme été oubliée par l’histoire. On essaie de la remettre en valeur. »

Différentes lectures

Alors, que vaut la lecture d’Une Terre à nous? Selon la biographe de Margaret Cook, Hélène Beauchamp, l’histoire de Norah dans ce roman illustre comment l’auteure voulait briser certaines traditions.

« Norah montre à quelle point Margaret Cook voulait sortir des traditions irlandaises, anglicanes, religieuses et de cette culture de village où les gens se surveillent les uns les autres et où l’omertà est roi, explique madame Beauchamp. On peut se poser la question si cette histoire n’est pas celle de l’auteure avant qu’elle ne marie monsieur Cook. On peut lire la trajectoire de Norah dans la thématique de la violence faite aux femmes, celle qui est faite par sa famille, sa communauté et son village et comment elle s’en sort. »

De son côté, Alexis Vaillancourt-Chartrand, enseignant en littérature au cégep de St-Jérôme, déclare qu’Une Terre à nous se lit très facilement.

« C’est un livre de première session [au cégep], affirme-t-il. Il est d’une grande fluidité et surtout, les personnages sont particulièrement bien incarnés. À travers l’histoire de Norah, c’est tout Argenteuil qui ressort. »

Finalement, Pierre Corbeil, traducteur de ce roman de mœurs, admet avoir eu du plaisir à faire son travail sur ce livre. « J’ai découvert une auteure que je ne connaissais pas et qui s’est donnée beaucoup de mal à dépeindre une époque et une parcelle de territoire peu connue, dit-il. On se prend d’amitié autant pour l’auteure que pour les personnages. On découvre aussi une époque qui n’est pas celle des Belles Histoires des pays d’en haut ou de Maria Chapdelaine. »

Le roman Une Terre à nous, de Margaret Cook, est disponible en version anglaise et française au Centre d’art d’Argenteuil et à l’hôtel de ville de Gore. Il est aussi possible de le commander sur le site web des Sentiers de Gore au www.lessentiersdegore.com. Le livre sera disponible pour emprunt, dans les deux langues, à la bibliothèque Jean-Marc-Belzile de Lachute.

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