L’épopée d’élever ses enfants en français présentée en série documentaire

L’épopée d’élever ses enfants en français présentée en série documentaire

Originaire du Québec, mais déménagée en Colombie-Britannique en 2015 avant de revenir récemment vers l’Ontario, Sandra Fortin n’est pas étrangère au sujet de sa nouvelle série.

«Quand on est déménagés en Colombie-Britannique avec ma famille, dont mes enfants de 18 et 19 ans à l’époque, j’étais stressée pour eux parce que je les trouvais vieux pour apprendre l’anglais. Mais en quelques mois à peine, ils sont devenus complètement bilingues! Ça m’a amenée à me questionner sur ce que ça doit être que d’élever de jeunes enfants en français dans un milieu anglophone», indique la scénariste que l’on connait déjà pour Maux mystères, parue en 2018, ou encore D’Amours et d’eau fraîche, télésérie franco-yukonaise parue en 2019.

De tout, pour tous

Le choix de s’intéresser d’abord aux mères francophones n’avait rien d’anodin. «On voulait mettre les femmes de l’avant, que le défi soit présenté par elles […] Mettre en lumière des mères d’aujourd’hui dans un esprit positif, parce que je trouve que depuis quelques années, on voit beaucoup d’émissions qui dénigrent un peu ce rôle-là. Oui, c’est un défi, mais ce n’est pas un calvaire d’avoir des enfants!» lance Sandra Fortin.

D’autant plus que pour ces mères francophones nées au Québec, au Manitoba ou encore au Cameroun, le défi de la langue s’ajoute à tout le reste.

La série en cinq épisodes ne s’arrête pas à cet enjeu, mais souligne également d’autres défis des parents d’aujourd’hui. Charge mentale, répartition des tâches au sein du couple, garde partagée, gestion des émotions chez les enfants et transmission des valeurs sont abordées dans le quotidien des cinq familles. Certains pères ont également participé à la série, un choix qui leur était offert.

«On voulait aussi que les Québécois et les gens nés en milieu francophone se sentent investis par cette série-là, parce qu’on ne se le cachera pas, les défis quotidiens d’une mère aujourd’hui sont pas mal les mêmes partout au pays», explique la scénariste en citant par exemple les choix nutritionnels, le choix des écoles et la question des vaccins.

Répondre à la «mauvaise presse»

Cela dit, la série sert aussi évidemment à sensibiliser les spectateurs à la réalité de la francophonie minoritaire : «Le français va toujours être un combat, je pense que ça ne sera jamais un acquis au pays, donc plus on en parle, mieux c’est! C’est important de faire connaitre ces enjeux au reste de la population canadienne», estime Sandra Fortin.

La série se veut également une réponse à la «mauvaise presse parfois faite aux francophones hors Québec», explique la scénariste qui aimerait «rétablir les faits» et souligner les batailles menées par les parents francophones en milieu minoritaire. «On veut leur montrer qu’on sait qu’ils sont là, qu’on connait leur réalité!»

À demi-mot, Sandra Fortin fait référence aux propos tenus par Denise Bombardier lors de son passage à l’émission Tout le monde en parle en octobre 2018 et qui ont déclenché une vague de révolte chez les francophones hors Québec. 

L’équipe de Maman! Mommy! était alors en plein tournage. «C’est certain que ça a fait parler, on a eu des discussions là-dessus […] On était encore plus contentes de faire cette série-là pour tenter de rétablir les faits!» concède Sandra Fortin.

L’école, en français ou en anglais?

Grâce à la participation des neuf enfants à la série, la scénariste espère que les spectateurs pourront avoir une meilleure idée de ce que vivent ces familles qui tentent de préserver le français dans un environnement pas toujours propice. «On veut aussi tenter d’apporter des réponses aux parents qui se demandent s’il vaut mieux envoyer leurs enfants à l’école francophone ou anglophone», propose-t-elle.

Elle cite en exemple Bastien, âgé de presque quatre ans, que sa mère a changé de garderie afin qu’il soit plus en contact avec le français. «Après trois mois on voit l’évolution, et on l’a vu passer d’à peine quelques mots de français à le parler couramment au cours des neuf mois où on a filmé la série! C’était incroyable.»

Le psychologue-conseil Serge Lacroix, que l’on ne voit pas à l’écran, mais qui «est derrière tous les épisodes et nous a aidés à comprendre ce qui se passait avec chaque enfant», a indiqué qu’il était impératif d’envoyer l’enfant dans une école ou une garderie francophone afin qu’il apprenne et conserve la langue française.

«Il faut qu’au moins 30 % de la journée se passe en français pour y arriver. Ce n’est pas assez le matin, le soir et les weekends», ajoute Sandra Fortin.

De plus, il apparait que les mères francophones en milieu minoritaire transmettraient davantage le français que les pères : 38,6 % versus 19,3 %, d’après les données du recensement de Statistique Canada en 2011. Un chiffre qui grimpe à 91 % lorsque les deux parents sont francophones (couple endogame).

Par chance, l’équipe a conclu le tournage de Maman! Mommy! le 8 mars, juste à temps pour ne pas être affectée par la pandémie. La série en cinq épisodes sera donc disponible le 25 septembre sur ICI Tou.tv.

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